mercredi 6 août 2008

Au revoir Naïs


Ma chienne est morte.

Je l'ai enterré le long de la haie
près des vieilles balles de foin.
Là, ni plus bas, ni plus haut,
un jour elle me retrouvera.
Pour le moment
elle est partie avec ses poils,
avec hululements inimitables,
sa truffe fraîche,
sa broche en acier chirurgical et son air de chiot éternel.
Et moi qui ne crois pas, matérialiste,
au ciel promis, au ciel céleste pour aucun homme quel qu'il soit
pour cette chienne ou tout autre chien je crois au ciel,
oui, je crois en un ciel
où je n'entrerai pas,
mais où elle m'attend
pour qu'à mon arrivée
l'affection m'y accueille.

Elle ne fut jamais un serviteur.
Elle eut à notre égard une amitié de félin,
gardant sa suzeraineté,
une amitié d'étoile indépendante
sans autre intimité que celle nécessaire,
sans exagérations.
Non, ma chienne, elle, me regardait
m'accordant l'attention dont j'ai besoin,
l'attention nécessaire
pour faire comprendre à un vaniteux
que dans sa condition de chien,
avec ces yeux-là,
plus purs que les miens,
il perdait son temps.

Pourtant elle me regardait de ce regard
que m'avait réservé toute sa douce vie poilue,
sa vie de berger, à vouloir garder tout ce qui se présentait,
tournant autour des poussins et des poules,
des chevaux trop rapides,
des chèvres effrontées et des chats affectueux,
lançant ses étranges aboiements d'otarie indignée.
Ou encore silencieuse près de moi
sous la Voie Lactée,
les aurores boréales,
les pluies d'étoiles filantes,
sur les crêtes pyrénéennes
ou lorsque le soleil s'éclipse,
sans jamais m'importuner ni rien me demander.

Bien sûr elle craignait le tonnerre que j'aime tant,
mais c'est un jour d'orage que nous l'avons adopté,
sans connaitre son age ni son passé;
douze ans et un mois plus tard elle nous quitte,
de la plus douce des façons,
au cœur de l'après-midi torride,
un frémissement inattendu à nos pieds,
deux secondes ont suffit.

Ensuite il y eu cette nuit peuplée d'éclairs,
et la pluie tiède sur la terre fraiche de sa tombe,
et nous ne pouvions y croire.

Il n'y a pas d'adieu pour ma chienne disparue.
Il n'y a, il n'y eut de mensonges entre nous.
Elle est morte, je l'ai enterré.
Ce qui lui est arrivé m'est réservé aussi,
qu'il y ait un ciel ou qu'il n'y en ait pas
Je me refuse à croire en un au-delà
Réservé à l'homme seul.
Ce ciel là n'en serait pas un.

Librement adapté du poème Un chien est mort de Pablo Neruda, in "La rose détachée", d'après la traduction de Claude Couffon.

3 commentaires:

Guigui a dit…

Mes sinceres condoleance, sa doit etre dur mais grace à la photo tu la rendu immortel ! nous avons une passion magnifique !
Courage !

Anonyme a dit…

Triste nouvelle joliment narrée. La perte d'un chien est une épreuve difficile. Nous pensons bien à vous et esperons vous voir rapidement !

Laurent Laveder a dit…

Mon cher PP, j'ignorais que tu avais une chienne. Généralement, quand je suis au téléphone, ce sont tes chats que tu réprimandes quand ils grimpent partout !
Il faut dire que les canidés sont moins acrobates que les félidés...
J'ai moi aussi connu la mort d'un chat qui vécu 22 ans en ma compagnie.
Les atomes de ta chienne ont été rendus à la Terre. Ils permettront de faire naître de nouvelles plantes pour qu'elle ne soit pas morte pour rien.
Mes pensées t'accompagnent comme on dit.
A bientôt. Kénavo !